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La Villa Lorraine by Yves Mattagne

La Villa Lorraine by Yves Mattagne

Ville : Bruxelles
Chef : Yves Mattagne
Site web : https://www.lavillalorraine.be/
Date de la visite : 11 décembre 2021

Après l’annulation de leur dîner de Gala en 2020, les Membres du Club royal des gastronomes de Belgique ont pu se retrouver cette année en tenue de soirée dans l’emblématique Villa Lorraine, dont les cuisines sont désormais sous les commandes d’Yves Mattagne que nous avions félicité en décembre 2019, alors qu’il concluait trente années de haute gastronomie au restaurant Sea Grill.

La Villa Lorraine a fait peau neuve. La musique se veut résolument moderne et dynamique. La salle au décor plus clair et léger qu’auparavant, baigne dans une lumière tamisée. Les fauteuils et les banquettes autour des tables rondes au nappage blanc impeccable, invitent à s’installer. Une haie de sapins illuminés sur la terrasse rappelle sans ostentation la période hivernale festive.

La 241ème cuvée du Champagne Louis Roederer est présentée en magnum par un jeune sommelier enthousiaste et passionné. Elle accompagne la première entrée de la soirée : un saumon légèrement mariné avec de la betterave – lui conférant une saveur délicate – et des cassis – apportant une acidité fruitée et parfumée. Une purée de haricots noirs fermentés ajoute à ce plat frais une complexité de saveurs umami. Les textures sont nombreuses – saumon fondant, perles blanches de glace citronnée, chips de tapioca, œufs de saumon, etc. – et donnent une dimension ludique bienvenue en début de repas.

Saumon Label Rouge / haricots noirs fermentés / betterave rouge / cassis (Champagne Roederer (en Magnum))

C’est ensuite un plat signature d’Yves Mattagne que nous retrouvons. Au creux d’une assiette blanche, une lamelle de champignon circulaire et dorée dissimule un dimsum aux cèpes et au foie gras, contre lequel est appuyée une tuile aux noisettes et un « terreau » de cazette. Sur une cuillère de mousse de lait, des copeaux de truffe blanche d’Alba embaument le plat. À côté de l’assiette principale, un galet noir brûlant cuit, devant les yeux de chaque convive, une grosse langoustine d’Islande, révélant son arôme subtil ; un trait de whisky écossais (d’une vieille distillerie proche de Glasgow) dont l’impressionnante combustion parfait la cuisson du crustacé, apporte une agréable saveur de malt qui complète celles de torréfaction et de sous-bois du plat, tout en faisant ressortir le caractère marin de la langoustine. Un Saint-Joseph (marsanne et roussanne) de la Maison Louis Chèze, à la belle robe paille, aux arômes délicats d’acacias, à la minéralité agréable et à la longue finale, exalte l’ensemble.

Langoustine flambée au Auchentoshan / cèpes / farine de foie gras / cazette / mousse de lait (Saint-Joseph, Ro-Rée, Louis Cheze, 2019, France)

Le restaurant est désormais au grand complet. L’importante et affable brigade de salle sous la direction experte de Fabrice D’Hulster, confirme son professionnalisme et son efficacité.

L’entrée suivante est dressée dans une assiette creuse surmontée d’un couvercle galbé, percé d’ouvertures, permettant aux convives d’en deviner le contenu, et aux serveurs d’y verser une sauce à la citronnelle, et qui, une fois retiré, permet de découvrir une noix de coquille Saint-Jacques dorée contre laquelle s’élève, en forme de corail, un biscuit au curry rouge du plus bel effet. La cuisson du coquillage est parfaite et les saveurs asiatiques bien dosées l’accompagnant restent en arrière-plan. Un chardonnay de Pernand-vergelesses (Domaine Arnaud, 2019), intense, fruité et frais en finale est proposé par le sommelier pour enivrer ce plat et le suivant : un dos de cabillaud cuit à basse température pour une texture onctueuse, mais que certains convives auraient préféré un peu plus chaud. Une généreuse cuillère de caviar Dauricus apporte le sel nécessaire au cabillaud et un maki d’huîtres « Perle Blanche » renforce le côté iodé du plat.

Noix de Saint-Jacques / citronnelle / coco / corail curry rouge / daïkon / chou nappa (Pernand-Vergelesses, À ma Fille Mahaut, Arnaud Baillot, 2019, France)

Nous terminons avec un filet de brocard à la cuisson irréprochable, accompagné, notamment, d’une marmelade de pamplemousse vanillée, et d’une croquette épicée de viande de chevreuil, qui, toutes deux, confèrent au plat son originalité. Un vin puissant, charpenté, très fruité et aux tanins fins, du domaine Richeaume en Provence (« Tradition, » 2018) se révèle une belle surprise.

Filet de brocard / poivrade aux épices / marmelade pamplemousse vanille / carotte pourpre (Domaine Richeaume, Tradition, IGP Méditerranée, 2018, France)

Pour conclure le repas, certains ont opté pour un dessert autour du coing et des graines de courge, dont j’ai entendu les éloges. D’autres, comme moi ont choisi un morceau de Comté parfaitement tempéré, servi, comme il se doit, avec un vin jaune, à la fois fin et ample et long en bouche (Domaine de Montbourgeau, 2013).

En fin de repas, le Chef est venu discuter avec les convives et nous avons pu le complimenter et partager avec lui nos impressions sur cet excellent repas, au tempo moderato bien réglé. On ne regrettera que l’heure de fermeture imposée à 23h.

Nul besoin de voyager bien loin, donc, pour trouver ce lieu empreint d’ordre, beauté, luxe, et volupté, cher au poète – le calme qu’il affectionnait étant cependant remplacé par la bonne humeur des convives.

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